Blogs et Législation : Une jeunesse en dérive

  En Janvier 2005, Joe Gordon, employé de chez Waterstones se fait licencier après avoir publiquement insulté à plusieurs reprises son patron sur son blog. Ce comportement, loin de se limiter aux relations patrons/employés, s’est aujourd’hui étendu à une frange plus importante de la population, après la condamnation de 8 lycéens récemment, ayant critiqué leurs enseignants sur leurs blogs. Le dérapage était inévitable, et ce pour plusieurs raisons. 

  Tout d’abord, les blogs sont un moyen d’expression très prisé de la jeunesse d’aujourd’hui, habituée aux moyens de communication en tous genres, et surtout les plus libres : messengers (msn, aim, yahoomessenger…), P2P (peer to peer : logiciels de partages de données permettant à deux particuliers de s’échanger des données de type multimédia, responsables de la guéguerre sur le piratage)…

  Les jeunes sont avides de ces nouveaux services, souvent sans bien y discerner la part de légalité ou de responsabilité. Et c’est ainsi que certains se trouvent piégés à leur insu et condamnés à de lourdes peines pour ce qu’ils n’imaginaient même pas être un délit.

En France

D’après la loi :

« Parler de son entreprise sur Internet ne constitue pas une faute susceptible de motiver un licenciement ou une sanction disciplinaire » 

 Si l’on ne risque pas de se faire licencier pour propos tenus sur un blog en France (tant que ceux-ci respectent les conditions stipulées dans le contrat de travail) ; des élèves ont, eux, été renvoyés de leur établissement suite à des propos injurieux tenus sur leurs professeurs. Comment expliquer cet écart ?

 La loi pour La Confiance dans l'Economie Numérique (LCEN) considère trois catégories d'acteurs: fournisseur d'accès, éditeur et hébergeur. Le « blogger » fait donc nécessairement parti de l’une d’elles. Reste à savoir dans quel groupe le classer. Car en fait, tout le problème vient, la plupart du temps, des commentaires postés sur le blog que ne peut contrôler ou alors qu’en prenant des mesures très spécifiques et pas du tout en vigueur (bannissement d’une personne, censure, validation de chacun des commentaires avant de le poster…) l’administrateur du blog.  

 Et une fois le mal fait, difficile de départager les différentes responsabilités qui incombent aux deux parties. Qui doit payer les pots cassés ? Le « blogger » est-il alors un éditeur (responsable de tout) ou un hébergeur (couvert par les dispositions spécifiques de la LCEN), sachant que l’hébergeur lui n’est pas tenu de contrôler le contenu mais seulement de réagir à toute plainte en retirant de la circulation l’objet conflictuel (objet qui ne respecte pas la loi) ? 

 Le problème est que pour prétendre être un hébergeur aux yeux de la loi, et donc bénéficier de droits qui en découlent, il faut respecter certaines conditions qui, la plupart du temps, sont complètement ignorées des administrateurs des blogs (détenir et conserver "les données de nature à permettre l'identification de quiconque a contribué à la création du contenu"). Sans ce préalable, le « blogger » sera taxé d’appartenir à la catégorie des éditeurs et ne sera donc pas couvert. Une solution serait de proposer une chartre de "bonne conduite" entre « blogger » et lecteur, ou d’entamer une opération de sensibilisation à grande échelle, afin d’éviter tout dérapage.

 Au final, les juristes devront, tôt ou tard, se pencher sur ce phénomène afin de régulariser ces situations, trop récurrentes pour être négligées.